Je partage, non pas ces vieux textes, mais cette naïveté. Je suis toujours aussi naïf mais avec d'autres mots!
Loin.
A la périphérie de la ville, j’ai surpris un peuple entrain
de vivre.
Dans un supermarché. Dans un bar.
Loin.
Loin des touristes envahissants et insoucieux.
Dans un supermarché à la périphérie de la ville, je vois le
peuple entrain de vivre…
Loin. Mais aussi ici, le prix sur le rayon, l’œil sur le
prix, la monnaie dans sa paume droite, on compte ses articles. Puis on compte
sa monnaie. La vie ! Loin des
touristes. Loin des musées. Loin des
églises.
- Tu fais quoi Hamid ?
- Viens Anna, on rentre dans ce bar…
Une fois dans le bar,
- 2 piwos, Poproché
- Je n’aime pas la bière
- Ne sois pas imbuvable, comme dit un écrivain de chez moi...
Ne fais pas attention Anna, rien n’est séquentiel, regarde
cet homme là-bas, il est entrain de ramasser des pièces par terre, pour se
payer un Cola…
- Hahahaha, l’ironie du sort, pour se payer un Coca-Cola !
- Le polonais est un peuple heureux, on dirait que tu veux les voir tristes et pauvres. On n’est plus dans la période des communistes. Les polonais est un peuple heureux.
- Vive Solidarnosc, Anna !
- Tu es dans les clichés, Hamid !!!!
Dans le bar, des tables parsemés dans la salle. Un homme par
table. La brume de cigarette domine le tout. Quelques instants plus tard,
toutes les tables sont vides, tout le monde se regroupe autour d’une table.
Anna, avec l’accent de Milosz, me dit :
- Tu sais, Hamid, je ne sais pas pourquoi, le peuple polonais ne s’unit que dans les moments de détresse.
- Oui, Anna, il fait froid mais on a chaud au cœur, Nie rezumiyi Populsku, Tchipracham
- Quoi ?
- Ça me rappelle les bars d’Alger. De tizi. Ou D’azazga.
- C’est aussi comme ça, chez toi ?
- Oui, c’est presque comme ça. La différence est la serveuse. Elle ne me rappelle pas chez moi. Mais des nouvelles de Dadda Hank.
- C’est qui ?
- Buk. Je veux dire Bukowski.
- Je ne connais pas !
- Ce n’est pas important… Je voulais dire que je veux écrire un long poème dont le titre serait Fragments d’un peuple vivant…
Tu vois ces gens, j’ai la tête scotchée à eux ! Mais s’ils
parlaient une langue que je comprends, j’aurais tourné la tête ailleurs !
Ce constat me fait peur Anna ! Parce que je conclus, terriblement, qu’on
cesse de s’intéresser à quelqu’un quand il devient familier… Je me fais peur, Anna !
- Tu fais quoi Hamid ?
- Tu ne vois pas que je m’assoie avec ton peuple.
- Tu abordes aussi les gens inconnus chez toi ?
- Chez moi, je n’ose pas. Va savoir pourquoi ! C’est peut être parce que je suis un eternel enfant. Et là-bas, les enfants n’ont pas le droit de s’asseoir avec les ainés…
Un, deux, trois, quatre… dix-neuf morts !
- Dix-neuf ouvriers que Solidarnosc a donnés en 1980…
- Pour la liberté !
- 127 morts chez moi en 2001 ! en 1980 rien, on n’a pas eu la chance de mourir ! Et tu sais quoi, Anna, je viens d’apprendre, par mon ami Kader, que chez nous on est conscient de cette règle : Il faut des morts pour avoir la liberté !
- Et vous l’avez eue ?!
- On a des Ipodes. Des Iphones. Des 3G. Mais, il nous manque aujourd’hui un Milozc pour écrire ce poème accroché là-bas…
Loin, je surprends un peuple entrain de vivre. Un peuple
étranger devient petit à petit familier me fait peur en me rendant compte que
je suis irrémédiablement différent.
- Ça veut dire quoi irrémédiablement ?
- Ça veut dire que je ne pourrai plus me sentir à la maison, chez moi…
- Comment ça ?
- Pour venir à ce poème, pour qu’un Algérien vienne lire ce poème, il a fallu qu’une italienne intervienne. En somme, grâce à une italienne, un algérien a lu un poème incompréhensible d’un polonais…
- Tu sautes du coq à l’âne…
- Je suis peut être soûl ... Mais dis moi si les frontière servent à quelque chose?
- Oui, ça doit être ça…
- C’est ton peuple qui me rend soûl. Anna, je ne sais pas si tu peux comprendre, mais je pense que la différence reflète souvent le soi. Quand on n’aime pas l’autre, c’est qu’on ne s’aime pas. Ton peuple je l’aime, ça voudrait dire que j’aime le mien ? Je vous aime.
- Quoi ?
- Je te fais peur ?! j’aime ton peuple.
…
- Hamid parle moi…
- Oui ?
- Arrête avec tes oui
- Ok.
- Et avec tes OK !
- Oui
- Tu fais quoi ?
- Ton peuple parle au mien en silence.
- Il lui dit quoi ?
- Il lui dit que la vie est aussi ailleurs. Ce n’est pas Kundera, mais c’est moi. Je vois les tiens vivre en polonais. Je veux voir les miens vivre en Kabyle. Parce qu’on oublie souvent que nous aussi on fait partie du monde.
- Quoi ?
- FIN. THE END. TAGARA. UKOŃCZENIE.
J’ai surpris un peuple entrain de vivre. Loin de touristes
insoucieux. Loin de ma mère tourmentée.
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