Plus encore, mieux encore, en chaque point, ici, est une bête brute, un homme, un pâtre ou berger, un héros courageux, un lâche, un demi-dieu, un dieu. Les sens, les valeurs buissonnent. Ce qui sort de la boîte noire est bien un géométral de légende, mais il faut y regarder de plus près. Chacun prend beaucoup de valeurs, et c'est parce qu'il les prend qu'il est substituable. Chacun est substituable, en laissant sauve la vérité de l'histoire. Mais il se trouve que certains sont, si j'ose dire, plus substituables que d'autre : Hercule a réellement toutes les valeurs, voleur, volé, sous prescription, lâche et courageux, incertain et certain, meurtrier ignoble et à demi lynché, homme, pour tout cela, mais, finalement, dieu. Cacus est mort, il n'est pas dieu. Evandre est roi, il n'est pas dieu. Hercule seul est un joker. Les autres sont des quasi-jokers, ils ne sont pas complètement substituables. Faut-il être un joker pour devenir dieu ? Hercule seul est un élément blanc, les autres sont en voie de le devenir. Que sort-il de la boîte noire ? Des éléments blancs ou quasi-blancs.
Un dieu est un vrai joker. Plus il est dieu et plus il est joker. Voyez Jupiter : il se fait cygne, il est taureau, il est cette pluie d'or qui bat le seuil de Danaé. Totalement substituable est le divin, totalement vicariant, totalement vicaire et victime. Vu d'ici, Jupiter est taureau, de là, il est cygne ; perçu des portes de la fille Danaé, il est pluie d'or abondante et large. Jupiter est le géométral des substitutions, il est l'ichnographie du monstrueux. Le dieu n'est pas un monstre, il est tous les monstres possibles, il somme les scénographies de monstres. Il est, ainsi, un élément blanc, blanc comme la somme des couleurs. Et c'est pourquoi un récit mythique a si souvent toutes valeurs, il met en jeu des jokers ou éléments blancs. Et c'est pourquoi il surplombe toujours l'ensemble des explications, toutes linéaires et analytiques, toutes inclinées. Le mythe comprend l'histoire, nulle histoire n'explique le mythe. L'histoire est une suite analytique issue, comme les bœufs, de la boîte noire à éléments blancs. L'Iliade est une séquence possible des légende, légende en effet, non pas mythe, puisque Hercule y est le seul joker divin. La légende est un mythe légèrement incliné. Je veux dire un géométral légèrement sténographié. Je veux dire un compas légèrement calé. Il incline vers l'aval, il descend une petite pente.
Nous ne sommes plus très loin des origines. La boîte noire est boîte de Pandore, tout peut en sortir. Le mythe est riche de tout le substituable, la légende en comprend beaucoup. Ainsi Tite-Live, romain, est-il plus près de l'histoire qu'Homère, hellène, mais pas beaucoup plus près. Qui peut se flatter d'en être voisin ?
Une première digression, je vous prie. Le mythe accompli, disant le divin, mêle des élément blancs. Il dessine un géométral au moyen de jokers. Il obtient alors tous les sens, il est une somme, il est, si j'ose le mot, pansémique. N'importe quel sens de l'histoire est donc déjà compris par lui. Théorème : nous pourrons toujours comprendre l'histoire au moyen des théologies.
L'argent et l'or, le papier-monnaie sont des équivalents généraux. Une somme, une somme d'argent est un élément blanc. Vous pouvez, avec elle, obtenir un taureau, un lac de cygnes, faire couler une pluie d'or du côté des propylées de Danaé, tenter, paraît-il, les dieux mêmes. Un récit raconté au moyen de tels jokers est, à nouveau, un géométral. N'importe quel sens de n'importe quelle histoire est donc déjà compris par lui. Théorème : nous pourrons toujours comprendre l'histoire au moyen de l'économie.
Conclusion : économie et théologie sont des explications équivalentes de l'histoire. Équivalentes : je veux dire omnivalentes.
Nous sacrifierons, dans le même temple, à Jupiter et à Quirinus.
Or, le géométral est obtenu par la substitution, par l'ensemble des substitutions victimaires. L'omnivalence est obtenue par la violence.
Nous sacrifions, sur le même autel, à Jupiter, à Mars, à Quirinus. La théologie, la violence et l'économie sont sur la même ligne, ou plutôt, elles occupent le même espace, je veux dire : tout l'espace.
Rome. pp. 40 à 42.
Baccio Bandinelli - Statut de Hercules et Cacus à Florence
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