dimanche 10 août 2014

Pedro Páramo - Juan Rulfo - Extraits audios

Pedro Páramo est un roman; un classique de la littérature mexicaine; un roman où les morts vivent avec les vivants, le passé se mêle au présent et les mythes sont témoins des révolutions...
 Les lectures, ci-dessous, étaient diffusées, en dix parties, en juin 2012, dans l'émission "Fictions / Le Feuilleton" de la Radio France Culture. Pedro Páramo, le personnage principal du roman, est joué, il faut le souligner, par le comédien Denis Lavant.


Adaptation et réalisation: Laure Egoroff D’après la traduction de Gabriel Iaculli.

Point de départ du roman
 Sur une route désolée de l’état de Jalisco, au Mexique, un homme avance en direction d’un village nommé Comala. Il s’appelle Juan Preciado. Il accomplit une promesse faite à sa mère sur son lit de mort : partir à la recherche de son père, Pedro Páramo, qui autrefois les a abandonnés. Un bourriquier aux paroles énigmatiques accepte de le conduire jusqu’au village qui semble désert. Avant de disparaître, il révèle à Juan Preciado que Pedro Páramo, dont il peut voir se dessiner à l’horizon l’immense propriété, est mort depuis bien longtemps. Juan pourrait rebrousser chemin, mais il pénètre pourtant dans ce village abandonné où une très vieille femme, apparemment l’unique habitante de Comala, semble l’attendre. Elle lui laisse entendre que le bourriquier qui lui a indiqué sa maison est mort depuis des années. A la suite de cette femme, d’autres âmes vagabondes viendront à la rencontre de Juan pour lui raconter l’histoire de son père, Pedro Páramo, le cacique du village qui régna en maître sur les terres et les âmes de Comala, et sema autant d’enfants que de morts derrière lui.

Quelques pistes…
 A première vue, deux époques s’entrecroisent : le présent de la quête de Juan Preciado et le passé qui surgit pour nous laisser entrevoir la vie et les agissements de son père, Pedro Páramo. Mais la construction de l’œuvre se révèle bien plus complexe, et nécessite, selon les dires de l’auteur la « coopération » du lecteur. Le récit n’avance pas de manière linéaire, les différentes temporalités ne s’entrecroisent pas seulement, elles communiquent, se répondent, les morts et les vivants dialoguent. Plusieurs thèmes sont à l’œuvre dans le roman. Il y a, bien sûr, la peinture d’une certaine réalité mexicaine : la pauvreté des villages reculés, la piété de leurs habitants, la tyrannie des propriétaires terriens (la seconde partie du roman a pour toile de fond la Révolution mexicaine). On peut y lire également la quête de l’identité, celle qui pousse Juan à partir à la recherche de son père. Mais Pedro Páramo recèle aussi un thème secret, celui de l’amour absolu et impossible - absolu car impossible ? - du personnage éponyme pour Susana San Juan. Elle est la clef de son univers et de toutes ses entreprises. Du village de Comala sur lequel Pedro Páramo régnait en maître, il reste des voix emprisonnées entre les murs décrépis. Ce sont elles que Juan Preciado entend bourdonner à ses oreilles dans les ruelles enroulées comme les cercles concentriques de l’Enfer. En fin de compte, ce que nous donne à entendre Pedro Páramo, à travers sa construction polyphonique, ce sont ces voix, répétant à l’infini « pour les siècles des siècles » leur « llanto ». Les histoires singulières des nombreux personnages du roman, la quête sans fin à laquelle chacun d’eux est condamné, convergent en une longue plainte collective, la douleur et la faute ressassées que rien, pas même la mort, ne peut apaiser. 

Le roman
 Ecrit entre 1953 et 1954, publié pour la première fois au Mexique en 1955 aux éditions Fondo de Cultura Económica. On a d'abord lu Pedro Páramo comme un roman "rural" et "paysan", voire comme un exemple de la meilleure littérature "indigéniste". Mais les innovations qu’il présentait au moment de sa publication sur le plan des thèmes, du style et de la construction narrative, ont valu au roman une place singulière dans les lettres mexicaines. Le renouveau de la fiction narrative dans le roman latino-américain des années 60 doit beaucoup à Pedro Páramo. Carlos Fuentes écrivait à son sujet : « L’œuvre de Juan Rulfo n’est pas seulement la plus haute expression à laquelle soit parvenu, jusqu’à maintenant, le roman mexicain : à travers Pedro Páramo, nous pouvons trouver le fil qui nous conduit au nouveau roman latino-américain. » Aujourd'hui, ce texte de 154 pages, l’unique roman de Juan Rulfo, est considéré, tout simplement, comme l'une des plus grandes œuvres du XXe siècle. 

L’auteur
 Juan Rulfo (1917-1986) est l'une des figures majeures de la littérature mexicaine contemporaine. Son œuvre est constituée de trois livres - le recueil de nouvelles Le Llano en flammes, le roman Pedro Páramo et Le coq d'or et autres textes pour le cinéma, tous publiés aux éditions Gallimard. Ils ont marqué un renouveau de la fiction narrative, annonçant la révolution du réalisme magique dans les lettres latino-américaines.

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